Bon, je me suis encore remis à l'écriture me fic, et je suis motivé cette fois-ci à la finir. Pour ce qui est de la faire, on verra.

Voici le chapitre 7. Le chapitre 8 sera, je vous l'annonce, épique et contiendra beaucoup de révélations.

edit ; C,est fait. Avouez que vous ne vous y attendiez pas.

7-Jeux de lumière
L’obscurité régnait depuis longtemps, mais le combat se poursuivait toujours dans la Plaine d’Hyrule. La barre des survivants de l’Union d’Hyrule allait bientôt descendre sous la centaine. Plus que jamais, ses membres commençaient à perdre espoir.
Les Stalfos ainsi que les Moblins étaient revenus à la charge pour une énième fois. Ils se déferlaient sur les guerriers sans leur accorder le moindre instant de répit, comme une vague risquant à tout moment de les engloutir. Même Oni-Link, dont la force s’était considérablement accrue, se sentait lentement défaillir. C’était surtout la magie qu’il usait pour continuer à faire brûler la boule de feu dans le ciel ténébreux qui l’épuisait. S’il ne cessait pas bientôt de l’alimenter en énergie, il tomberait sans doute inconscient, et tous ses efforts auraient été vains. N’en pouvant plus, il leva les bras. Le soleil artificiel disparut, plongeant la Plaine dans une noirceur presque totale. Le héros savait que cela ne ferait que détruire encore plus la morale de ses troupes ; et, voyant moins bien dans le noir, contrairement à lui, plusieurs guerriers ne pourraient éviter des attaques sournoises.
Contre toute attente, la clarté revient sur le champ de bataille ; or elle venait non pas du côté de l’Union d’Hyrule, mais plutôt de celui-ci de leur ennemi ; et la lumière était plus pâle et légèrement bleutée, comme si la lueur de la lune eût décuplé en vigueur.
L’émoi des habitants des deux royaumes fut toutefois de courte durée, et elle se transforma graduellement en terreur ; car ils constatèrent l’éclat provenait de scarabées géants à la carapace luminescente qui volaient en leur direction dans un horrible vacarme de bourdonnements. Tous les guerriers plaquèrent aussitôt leurs mains sur leurs oreilles, obligés de lâcher leurs armes, sans quoi leurs tympans auraient probablement éclaté. Seul Oni-Link ne broncha aucunement.
Quelques insectes se posèrent devant eux, rendant la clameur moins assourdissante et permettant aux combattants de récupérer épées, lances et arcs. Les autres planèrent au-dessus d’eux et plongèrent à toute vitesse sur eux, ou alors les surprirent par derrière.
Dès que la première bestiole se posa près de lui, le chef de l’Union d’Hyrule se jeta sur elle ; or son arme, malgré qu’elle fût extrêmement puissante, ricocha sur sa carapace qui paraissait embrasée d’un feu bleu. Autour de lui, ses troupes s’acharnaient à tenter de la transpercer, mais plusieurs rompirent leur arme sur le dos des scarabées et, sans défense, périrent piétinés ou encore broyés par leurs mandibules énormes. Leur cuirasse était plus dure encore que le roc.
C’est à ce moment que vint une aide inopinée : descendant l’escalier du village Cocorico, ce qui semblait être des rochers vivants apparurent, marquant le sol de profonds sillons. Ils foncèrent férocement vers les insectes qui, sous le choc brutal, furent projetés dans les airs. Plusieurs se retrouvèrent coincés sur le dos, révélant leur abdomen qui n’était protégé par aucune armure. Remarquant cela, Oni-Link cria :
- Leur ventre ! Il faut que vous atteigniez leur ventre !
Aussitôt dit, aussitôt fait. La grande majorité des bestioles furent terrassées de cette façon, les Gorons les renversant, puis les Hyruliens ou les Ezneclais les abattant ; les autres, ceux qui tourbillonnaient toujours au-dessus d’eux, furent assaillies par une pluie fatale de flèches. Quand elles trépassaient, leur corps cessait de s’illuminer. Enfin, le silence régna dans la Plaine d’Hyrule. La tension était toutefois palpable dans les troupes du héros. En effet, c’était le calme avant la tempête.8-Le Fils de Din
Tout à coup, un horrible hurlement déchira la nuit. Un frisson glacé parcourut le dos de tous les membres de l’Union d’Hyrule. La terre trembla. Puis, soudain, une immense flamme jaillit du Grand Marché ; pendant un instant, plusieurs crurent que la Montagne de la Mort entrait de nouveau en éruption. De ce brasier ardent bondit une créature d’une taille colossale. C’était un véritable démon. Ses yeux de braise projetaient un regard incendiaire, insoutenable. Sa bouche, par laquelle s’échappait une impressionnante quantité de vapeur – bien que cela ressemblât davantage à de la fumée – s’étirait en un affreux rictus de haine, et entre ses dents qui étaient à s’y méprendre tellement elles ressemblaient à des poignards pointait une langue fourchue, d’un rouge violacé. Des cornes grosses comme des bœufs émergeaient de son crâne, aussi aiguës qu’eût été la pointe d’une lance de diamant. Juste derrière émergeait un grand pic, suivi de nombreux autres qui descendaient le long de son échine jusqu’à sa queue, qui était en fait une boule couverte d’aiguilles, tel un fléau auquel on eût insufflé la vie. Sous ses omoplates, il y avait des ailes noires et osseuses, similaires à celles d’une chauve-souris et qui, malgré qu’elles fussent trouées, semblaient encore utilisables par quelque magie sombre. Finalement, deux griffes plus longues que la plus longue des claymores garnissait ses mains, dont une tenait une flamberge et l’autre un fouet qui semblait incandescent.
Oni-Link crut entendre le rire machiavélique du seigneur du mal provenant du haut de sa tour, or peut-être était simplement l’angoisse grandissant qui montait en lui qui lui faisait imaginer des choses.
Cette abominable créature atterrit à quelques mètres seulement du héros – qui ne s’en sentait par ailleurs plus un – faisant violemment trembler la terre, tel le spasme d’un homme agonisant. Le cœur du jeune homme lui parut cesse de battre. La bâte faisait plus d’une dizaine de fois sa taille. « Je ne pourrai jamais vaincre un tel monstre, songea-t-il. Il va nous décimer en peu de temps. »
- Je sais que tu es fatigué, fit Link Noir, mais ce serait le bon moment pour utiliser tes pouvoirs magiques. Je te recommande bien sûr l’eau. Ça donnera une bonne leçon à Ganondorf. Je me demande où il l’a pris car, même dans le monde des damnés, on ne trouve pas de tels êtres. On dirait un Magmaudit, mais en beaucoup plus puissant.
La créature toisait Oni-Link avec tellement de férocité que ce dernier était incapable de scruter ses yeux, de peur de sombrer dans la folie. Epona, quant à elle, semblait pétrifiée, comme les montures de Naec et de Fehan. C’est alors que le démon ouvrit la bouche. Il parla d’une voix lente, puissante, caverneuse, sifflante, mêlée de cliquètements métalliques ; une vois effrayante :
- JE SSSSUUUUIS TON PIRE CAUCHHHHHEMAR… JE SSSSUIS… LE FILSSSS DE DIN !
Le héros eut un frisson comme il n’en avait jamais eu, comme si une décharge électrique l’eût foudroyé à ce moment précis. Si ce que disait le monstre était vrai, ils étaient vraiment dans le pétrin, comme s’ils ne l’étaient pas déjà assez… Et même si la bête mentait, il l’aurait cru de toute façon, puisque sa voix l’hypnotisait profondément, raisonnant dans sa tête encore et encore en un écho incessant. Et pourtant, il réussit à articuler, quoique difficilement :
- Tu ne me fais pas peur.
Le Fils de Din poussa un grondement sourd ; Oni-Link ne put déterminer si c’était un cri de colère ou un éclat de rire.
- TU CROIS POUVOIR ME FAIRE PEUR, PETIT HUMAIN ?! TOI ET TA RIDICULE ARMÉE ? CAR MOI, JE SSSSAIS QUE JE TE FAIS PEUR. TU AS PEUR, PETIT HUMAIN, TU AS PEUR…
« Tu as peur… tu as peur… » Ces mots ne faisaient qu’accroître son sentiment d’insécurité. Mais Link Noir, lui, ressentait plutôt de la colère. Il explosa :
- Je ne suis pas un humain. Je suis un demi-dieu. Nous sommes un demi-dieu. Comme toi. Mon frère.
- F… frère ? balbutia la bonne partie de sa conscience.
- Oui, frère, répéta sa sombre moitié en étant seulement audible pour Link. Tu es… nous sommes… les fils de Din.
Oni-Link sentit son cœur chaviré. Bouleversé, il se dit :
- Absurde. C’est absurde…
- C’est pourtant la vérité. Désolé de te l’apprendre dans de telles circonstances. Je ne voulais pas te mettre du poids de plus sur les épaules, et je ne voulais pas que tu éprouves de la pitié – car cet être est profondément mauvais, et il le sera toujours, quoi qu’il arrive. Tout ce que je peux te dire, c’est que ta mère est fière de toi.
- Non, cela n’augmente pas mon fardeau. Au contraire, cela ne fait que me donner encore plus envie d’abattre une fois pour toutes le seigneur du malin.
Comme il arrivait souvent quand il discutait avec lui-même, le temps cessait de s’écouler jusqu’à ce qu’il se « réveille ». Il leva les yeux, affrontant du regard ceux de son frère – qui semblaient d’ailleurs avoir perdu de leur éclat -, demandant à la grande surprise de tous les membres de l’Union d’Hyrule qui se trouvaient derrière lui :
- Frère…
- SSSSISSSSMA. APPELLE-MOI SSSSISSSSMA, siffla le démon d’une voix sans timbre.
- Sisma… quand as-tu basculé du mauvais côté ?
À ce moment, son esprit bascula et il se trouva plongé dans la conscience brûlante de la créature qui était vraisemblablement son frère. Il vit une femme aux longs cheveux bouclés, rouges, d’un rouge rubicond, enflammé. Il vit un ruisseau de flammes entre deux rives d’or massif. Et alors il vit Sisma. Un jeune bambin, de plusieurs quornilles de hauteur, certes, mais un jeune bambin quand même. Malgré son apparence quelque peu monstrueuse, un large sourire s’étirait sur son visage, découvrant ses dents pointues. Puis, tout à coup, son sourire disparut, remplacé par une terrible grimace de colère. Sisma n’avait pas respecté les lois divines et s’était retrouvé condamné à côtoyer les âmes mauvaises pour toujours. C’est à ce moment qu’il avait rencontré Ganondorf, qui avait facilement réussi à dominer son esprit corrompu.
Oni-Link ouvrir les yeux. Il n’avait toujours pas bougé. Sisma, contre toute attente, pleurait des larmes de lave, qui s’écrasaient en grésillant sur le sol, formant des cratères. Or, le héros, qui croyait pouvoir exploiter ses sentiments pour faire de lui un allié éventuel, s’était trompé : il n’avait fait que décupler la haine de son frère en faisant émerger le sombre passé de celui-ci.
- Sisma, répéta Oni-Link, mais sa voix tremblait.
- TAIS-TOI ! TAAAAAIIIIS-TOOOOIIII !!!
Le démon poussa un rugissement tellement puissant que, même en plaquant leur main sur leurs oreilles, les membres de l’Union d’Hyrule ressentirent de la douleur, et les tympans de plusieurs d’entre eux faillirent bien exploser. On entendit ce cri jusqu’à Calatia et même Eznecla ; partout, les gens tremblèrent de peur.
Sans avertissement, Sisma fit claquer son long fouet enflammé. Il manqua fort heureusement son coup mais, même s’il se trouvait à une certaine distance du flagelle, il en sentit la cuisante chaleur.
Son frère utilisa alors son flamberge qui faisait près de deux quornilles de longueur. Oni-Link n’eut le temps que de lever son Excalibur des Fées pour parer le coup, et le choc fut tellement brutal qu’il fut propulsé dans les airs et retomba derrière Fehan et Naec qui décidèrent de prêter main-forte à leur capitaine. Or celui-ci s’écria :
- Non ! Je suis le seul dans la mesure de le vaincre. Repliez plutôt vous.
Fort heureusement, Sisma ne semblait avoir d’œil que pour lui.
Il se rappela le conseil de sa sombre moitié : il tendit donc le bras et un puissant jet d’eau émergea de la paume de sa main ; or le liquide s’évapora avant même de toucher le monstre. Oni-Link jura silencieusement.
La créature bondit en sa direction et l’attrapa de ses doigts griffus, le levant au-dessus de sa tête. La nouvelle forte consistance du héros lui sauva la vie, puisque, s’il avait été dans sa forme normale, il aurait automatiquement été écrasé par la solide poigne du demi-dieu. Tous les os de son corps craquèrent et son bras droit se disloqua. Mais le pire était la chaleur insupportable qui chauffait comme un fer rouge chaque parcelle de sa peau. Il n’eut même pas la force de crier. Ça y était, il allait rejoindre sa mère au royaume divin…
Vint alors une aide inespérée. C’était Kaepora Gaebora. Il replia ses ailes et plongea à toute vitesse vers Sisma, qui ne le vit pas venir. Il se percha sur sa tête, que le démon secoua violemment, et le hibou planta son bec acéré dans chacun de ses yeux, avant de s’envoler les plumes enflammées tel un phénix. Le monstre lâcha son frère, portant ses mains à ses yeux crevés, hurlant à s’en déchirer les poumons. Il cracha maints jets de flammes, se retourna en renversant une dizaine de soldats de sa queue hérissée de pointes, tenta de s’envoler mais retomba lourdement et s’affala au sol. Oni-Link s’approcha de lui et, dans un ultime effort, oubliant la chaleur insupportable qui lui brûlait le corps entier, s’approcha le plus qu’il put de son frère et planta violemment sa lame dans son thorax. Avant de disparaître comme le faisaient tous les monstres sous la domination du seigneur du malin, Oni-Link eut le temps de murmurer :
- Je te libère.
9-La perte d’un grand sage
Tout à coup, après l’éclat aveuglant du feu embrasant Sisma et ses cris gutturaux, la Plaine d’Hyrule paraissait extrêmement silencieuse et obscure.
Pour la première fois depuis longtemps, Oni-Link pleura. Tout s’était déroulé si rapidement… Il peinait à réaliser qu’il avait tué son frère ; un frère qu’il n’avait pas connu, certes. Maintenant, une foule de questions se bousculaient dans sa tête. Néanmoins, elles furent rapidement chassées par des cris provenant de derrière lui.
Les soldats de l’Union d’Hyrule formaient un cercle autour de ce qui semblait émettre de la fumée. Un effluve de brûlé flottait dans l’air frais et cristallin. Le héros accourut vers le rassemblement. Sa bouche s’ouvrit, mais aucun son n’en sortit.
Kaepora Gaebora, une aile cassée, le plumage noirci et même par endroit inexistant en laissant seulement entrevoir de la chair sanguinolente, était étendu sur le dos, les yeux clos, la respiration difficile, haletante. Il poussait par moment de brefs et faibles roucoulements, probablement de douleur. Oni-Link s’agenouilla à son côté.
- Maître Gaebora…
Le hibou écarquilla légèrement les paupières. Ses yeux jaunes et globuleux, laissant deviner une grande intelligence et une grande sagesse, perdaient graduellement de leur éclat ; la vie quittait peu à peu l’oiseau. Il murmura d’une voix si faible qu’elle était à peine audible :
- L… Link…
Il referma les yeux, si longtemps que le héros cru qu’il avait déjà trépassé. Mais ils finirent par se rouvrir.
- Link… répéta Kaepora dont chaque syllabe semblait le faire profondément souffrir. Link, je te connais depuis que je t’ai aperçu sortant de la Forêt Kokiri. J’avais un pressentiment… le pressentiment que tu aurais un rôle très important à jouer dans l’avenir du royaume… et c’est le cas… Tu es sans contester la personne la plus courageuse que je connaisse. Je suis sûr que tu réussiras à vaincre le seigneur du malin. Le secret, c’est d’être plus malin que lui…
Il marqua une courte pause, le temps de reprendre sa respiration qui s’épuisait rapidement.
- Puissions-nous nous croiser de nouveau un jour dans le domaine des déesses… Ne perds pas espoir, Link. Tu réussiras à rétablir la paix en Hyrule. Je le sais.
Le hibou toussa profondément. Il souffla dans son dernier soupir :
- Tu réussiras.
Ses yeux devinrent vitreux. Oni-Link baissa la tête, le visage inondé de larmes. Il n’était pas le seul à être chagriné. Tous les habitants du royaume connaissaient la renommée de ce grand hibou au cou très flexible. Ils venaient de perdre un grand sage, probablement l’être le plus sage de tout le royaume.
Link Noir s’agita dans les pensées de Link. Celui-ci tenta de le chasser, furieux qu’il le dérange dans un tel moment, mais il en fut incapable.
- Cela est la preuve que la mort vient même chercher les êtres les plus bons, les plus forts, les plus sages. Réfléchis-y bien.
Link ne pouvait être en désaccord avec ces propos.
Ganondorf décida apparemment de leur laisser encore un moment de répit, à leur grand bonheur. Étant donné la grande fatigue des troupes, il fut convenu qu’on célébrait de décentes funérailles à Gaebora et, par le même, à tous les autres trépassés, à la fin de la guerre… si elle avait une fin. On avait amené la dépouille inerte de l’oiseau jusqu’à la forteresse Gerudo, où on l’avait mise en lieu sûr.
Cette nuit-là (qui dura très peu de temps, la minuit étant déjà depuis longtemps passée), tous dormirent d’un sommeil agité, pressentant que le maître des ténèbres leur laissait le pire pour la fin. On ne mit aucune sentinelle à l’entrée du camp, probablement parce qu’aucun des soldats n’avait assez d’énergie pour le faire.
Les cocottes du village Cocorico laissèrent bientôt entendre leur cocorico.10-Entre mère et fils
Le lendemain matin, l’ambiance était terrible. Il ne reste plus que soixante-douze survivants dans l’Union d’Hyrule, soit moins du tiers de leurs effectifs initiaux. Chacun connaissait au moins un individu décédé dont ils étaient proches dans la Guerre de la Triforce. De plus, presque personne n’avait dormi autant qu’il ne le voulait, ce qui expliquait l’humeur maussade des soldats. Finalement, la mort récente de Gaebora les avait tourmenté.
Cette journée-là, ils demeurèrent tous dans leurs tentes, bien que préparés à toute éventualité. Le prince de l’obscurité ne les attaqua pas, et l’astre de Din déclina rapidement dans le ciel pour venir remplacer l’azur pur de la voûte par un marbre noir picoté de blanc, le tout dans une explosion de teintes et de couleurs tel un chou-péteur arc-en-ciel, ce qui donna lieu à un spectacle grandiose, qui ramena légèrement le moral dans les troupes.
Tous furent bientôt de nouveau couchés. Tous, sauf un : Oni-Link. Incapable de trouver le sommeil, il préférait rester à l’extérieur à contempler le feu.
Or tout à coup, il crut voir deux yeux le scruter au travers des flammes. Il secoua la tête, pensant que la fatigue lui jouait des tours. Mais cela semblait bien réel. Quel événement surnaturel avait présentement lieu? Il sentit un pincement au cœur, songeant à Ganondorf qui aurait pu user de sa magie maléfique.
Son inquiétude ne dura toutefois pas longtemps : une voix chaleureuse le rassura rapidement, il ne sut pourquoi, ni d’où elle venait :
- Tu es en sécurité…
Il écarquilla les yeux : une face était maintenant visible dans le brasier et était vraisemblablement en train de lui parler.
- Qui… qui êtes-vous ? demanda-t-il, un peu effrayé.
Il avait déjà vu des choses horribles dans sa vie mais, il ne savait pourquoi, il sentait que l’entité qui lui parlait était considérablement puissante.
L’être de feu laissa entendre un rire léger, qu’on eût pu confondre avec un crépitement. Il répondit :
- Je suis ta mère, bien sûr.
Le héros sursauta comme il ne l’avait jamais fait. Les déesses lui avaient déjà parlé, certes, mais pas de cette manière. Oni-Link aurait de la difficulté à nommer une des déités qu’il vénérait « maman ».
Il demeura silencieux un moment, le temps de se reprendre contenance. Une foule de questions se bousculaient dans sa tête. Il demanda :
- Pourquoi ne m’avez-vous averti avant ? Pourquoi alors l’Arbre Mojo m’a dit que ma mère était hylienne ?
Din rit une nouvelle fois.
- Mais ta mère était hylienne. C’était moi, incarnée en femme. Quant à ta première question, c’est compliqué, très compliqué. Je te raconterai un jour. Peut-être.
- Je ne veux pas vous vexer, loin de là, c’est une simple question de curiosité : pourquoi ma mère n’est-elle pas Farore ? Après tout, j’ai reçu la Triforce du Courage.
- Cela ne veut rien dire. D’aucuns sait que tu possèdes en plus du courage une grande force, autant physique que morale. Chaque minuscule parcelle de notre royaume contient l’essence de moi et mes deux sœurs.
- Et les autres royaumes ?
- Ils nous appartiennent aussi. Après Hyrule, nous ne nous sommes pas arrêtés, contrairement aux croyances : nous avons conçu d’autres royaumes, même d’autres mondes…
- Pour… pourquoi êtes-vous apparu à moi ?
- Je tenais à t’informer d’une chose. Mon feu t’aidera quand le moment viendra ; et quand le moment viendra, tu comprendras.
- Je ne suis pas sûr de bien saisir…
- Quand le moment viendra, tu comprendras…
- J’ai une autre question. Elle concerne mon frère.
Le feu augmenta subitement en intensité.
- Ne me parle pas de lui. Il a eu le sort qu’il méritait…
- Mais…
- J’en ai assez dit !
Les flammes perdirent lentement de leur vigueur.
- Bon, il est temps pour toi de reprendre des forces, mon fils. Le combat final arrive à grands pas. Je suis fier de toi. J’ai toujours été fier de toi. N’oublie surtout pas : mon feu t’aidera quand le moment viendra.
Bientôt, la déesse ne fut plus que cendres et braises.
11-Effrois, super-effrois, cerbères, hydre et golems
Oni-Link ouvrit les yeux. Déjà le matin. Il s’était endormi devant le feu, qui n’était maintenant plus qu’un tas de branches calcinées encore fumantes.
Toute l’Union et les Ezneclais s’affairaient autour de lui. Ils aiguisaient leurs lames, enfilaient leur armure, se réchauffaient pour la bataille. Le héros vit Zelda émerger d’une tente, radieuse malgré les événements difficiles qu’elle avait éprouvés ; son sourire s’effaça aussitôt qu’il aperçut Naec, qui l’enlaça et l’embrassa. Sa colère contre la vie cruelle, qui s’était apaisée pour une des rares fois depuis longtemps, se mit de nouveau à gronder en lui. Link Noir dit :
- Canalise cette énergie négative contre ton ennemi. Tu verras, ça marche.
La bonne partie de lui-même ne l’entendit pas vraiment, perdu dans ses pensées.
Il vit ensuite A’guì sortir d’un autre abri, dans les bras de Luryo cette fois-ci. Les deux femmes dont il s’était entiché avaient trouvé un autre amant que lui. Cela l’enrageait. Au moins, cela avait pu rendre Luryo un homme meilleur.
Cette journée-là encore, ils préféraient attendre dans leur campement plutôt que de se diriger directement sur le champ de bataille, ce qui provoquerait Ganondorf. Bien entendu, on avait laissé des éclaireurs qui donneraient l’alarme dès qu’ils verraient le moindre signe du mouvement du côté adverse… ce qui ne tarda pas à arriver. Toute l’armée s’ébranla avec toute la célérité possible. Oni-Link monta sur le dos de sa jument et partit en tête de troupe.
Ils eurent tout d’abord affaire à une série d’effrois. Ceux-ci étaient plutôt lents, mais leur cri perçant et angoissant faisait figer de peur même les plus hardis combattants. Heureusement, il n’y eut aucun trépassé de leur côté durant cette première vague. Toutefois, une nouvelle série d’effrois émergea de la citadelle ; ceux-ci étaient verts et extrêmement rapides. Ils sautaient au cou du premier venu. L’un deux tua le cheval de Naec, qui en fut fort désarçonné, et un autre faillit bien faire tomber le héros de sa selle. Les morts-vivants réussirent à étrangler deux de ses hommes.
Puis, on entendit des jappements. Des jappements rauques, furieux. On ne tarda pas à en connaître la cause : en effet, trois cerbères apparurent. C’était des chiens noirs géants dotés de trois têtes, dont les crocs reluisaient et les gueules ruisselaient d’écume. Oni-Link s’attaqua à un à lui tout seul. Il trancha une tête, puis deux : la mâchoire de la troisième claqua à quelques centimètres de la gorge du héros. Celui-ci enfonça profondément sa lame dans le gosier de la créature. Il jeta un regard aux deux autres bêtes : à son grand bonheur, elles étaient déjà abattues, l’une par plusieurs dizaines de flèches fichées dans son crâne et l’autre vaincu par un courageux Ezneclais qui avait osé grimper à l’encolure du canidé mastodonte pour planter son épée dans sa nuque, bien que cela lui avait coûté la vie.
Ganondorf avait décidément cherché une panoplie de créatures pour ses troupes, car c’est une hydre qui vint subséquemment. Le serpent était immense et possédait une multitude de tête qui s’agitait dans tous les sens. On devinait par ses longues dents pointues un puissant venin qu’il sécrétait.
Au lieu de s’attaquer à Oni-Link comme celui-ci s’y attendait, le reptile rampa à toute vitesse en le contournant et ses têtes s’attaquèrent à tous les guerriers se trouvant sur leur passage. Le héros vit avec stupeur les crocs du monstre transpercer avec facilité la dure carapace rocheuse d’un Goron et déchiqueter une armure d’acier comme si c’eût été la pelure d’une orange. Les touchés avaient à peine le temps de se tortiller qu’ils trépassaient, et leur peau devenait noire comme la suie avec de se décomposer à cause du venin extrêmement puissant. Mais ce n’était pas le pire : à chaque fois qu’une des têtes était coupée, elle était automatiquement remplacées par une autre par on ne savait quelle sorcellerie.
Oni-Link se décida d’agir. À l’aide de son Excalibur des Fées, il trancha une dizaine de têtes à la fois et ce, à plusieurs reprises. Or, une tête semblait résister à tous ses assauts. Plus grosse que les autres, elle se trouvait au milieu. Elle faisait siffler une langue fourchue. Son épée avait pourtant bien réussi à fendre le roc… C’est à ce moment que Link Noir intervint :
- Inutile de t’apitoyer sur cette créature. Tu ne pourras jamais trancher cette tête. Elle est immortelle.
- Mais que faire alors ?
- Je ne sais pas.
Le héros, tout en continuant à détacher les autres têtes de l’hydre afin de les empêcher de s’attaquer aux soldats sous ses ordres, fit part de la situation à ses deux subalternes immédiats. Ceux-ci paraissaient tous aussi désemparés que lui. C’est alors que Naec leva le doigt.
- J’ai une excellente idée ! Puisque nous ne pourrons jamais vaincre ce monstre même si nous nous y acharnions pendant des jours, nous devrions essayer de la piéger… pour toujours ! Et il y a un endroit pas loin d’ici où on pourrait faire cela. La Vallée Gerudo.
Oni-Link opina du chef, approuvant l’idée. Il proposa de le faire lui-même, pendant que les autres combattants resteraient ici. Par conséquent, après êtres descendu d’Epona, lentement, il se dirigea vers le chasme, feignant fuir les crocs du serpent qui n’avait maintenant qu’yeux que pour lui – et il en avait beaucoup, des yeux ! Cela lui prit plusieurs minutes avant de finalement atteindre le gouffre. C’était maintenant l’étape la plus risquée. Il revint derrière l’hydre pour tenter de le pousser dans le vide, mais c’était peine perdue. Il reprit alors position sur le bord du creux, voulant esquiver une morsure du reptile qui propulserait celui-ci dans la vallée. Or une des têtes faillit pour une autre fois lui faire perdre la vie, ce qui aurait été le cas s’il n’aurait pas saisi la gueule de la créature à deux mains pour l’en empêcher. Une aigre odeur de toxicité emplit ses narines. Une deuxième tête l’attaqua, le faisant perdre pied et basculer dans le vide. Il tomba un long moment, presque aussi longtemps que lorsqu’il avait fait une chute du dos du dragon gardien de l’écu d’Assayli, et atterrit finalement dans une grande éclaboussure dans l’eau glacée qui descendait jusqu’au Lac Hylia. Il ne se heurta heureusement pas aux rebords dangereux des falaises rocheuses. Le courant l’entraîna rapidement jusque dans le lac, où il cala profondément dans l’eau. L’oxygène commençait à lui manquer, mais il se rappela heureusement qu’il possédait maintenant des pouvoirs sur les éléments. Il créa donc une bulle d’air autour de lui, le temps de réussir à remonter à la surface. Il atteignit ensuite la rive en quelques coups de brasse. Le scientifique fou habitant non loin de là était mort il y avait de cela deux ans ; le propriétaire de l’étang où on pouvait pêcher de jolies prises, quand à lui, été mystérieusement disparu en ne laissant dernière lui que sa casquette, qu’on avait retrouvé flottant dans l’onde. Mais ce n’était pas le moment de penser à cela. Il fallait qu’il se dépêche de retrouver l’hydre avant qu’il ne s’attaque aux autres, qui croyaient qu’il s’en était occupé. Il serait également nécessaire de ne pas jeter le serpent dans l’eau, mais bien dans une crevasse de la vallée ; sinon, le monstre nagerait jusqu’ici et reviendraient les attaquer.
Quand il revint à la Plaine d’Hyrule, il constata avec joie que personne d’autre n’avait perdu la vie. Ses troupes faisaient maintenant bien faible allure comparativement à la vaste étendue de la Plaine d’Hyrule. Celle-ci, autrefois verdoyante, n’était maintenant plus qu’herbe jaunie et desséchée, terre piétinée et arbres fendus en deux ou brûlés.
Oni-Link aperçut l’hydre qui revenait en sa direction. Il se hâta en sa direction, la ramenant à la vallée, où il réussit, mêlant chance et agilité, à la faire tomber dans un trou au cœur de la falaise. Longtemps après, des légendes courraient sur ce reptile apparemment immortel, et peut-être un jour reviendrait-il semer la terreur dans le royaume, qui sait ? En tout cas, il ne l’espérait pas.
Encore ruisselant – autant de sueur que de l’eau d’Hylia –, il revint au champ de bataille. Voilà qu’encore un nouvel ennemi les prenait d’assaut. C’étaient des gens de pierres… des golems. Il y en avait une dizaine. Seuls les Gorons étaient dans la capacité de leur faire au moins un peu de dommage. Les Gorons… et lui. Il courut retrouver sa jument, qui, dans sa grande intelligence, avait pensé à se rapprocher de la vallée en attendant son retour. Oni-Link se dirigea à l’extrême gauche de la citadelle, dégaina son épée et, se dirigeant vers la droite, faucha les unes après les autres les colosses rocheux. Or le dernier d’entre eux eut le temps de réagir et lui assena un violent coup de poing ; en fait, il ne se rappela pas avoir reçu un tel coup de poing jusqu’alors. Il vola haut, très haut dans les airs, et retomba plusieurs dizaines de quornilles plus loin, réussissant heureusement à amortir sa chute par un coussin d’air créé par sa magie. En se relevant, il fut soulagé de voir que sa monture était indemne. Les Gorons, apercevant leur chef se faire malmener, s’étaient tous jetés sur le dernier golem, le ruant de coups. Ils réussirent finalement à leur faire mordre la poussière. Oni-Link ne remonta pas tout de suite en selle. Il croyait voir du mouvement provenant de l’intérieur de la citadelle.
Effectivement, une haute et large silhouette obscure, drapée de noire, avançait maintenant seule en leur direction à partir du grand marché. Oni-Link espérait qu’il ne s’agisse pas d’un nouveau démon comme le fils de Din, ce qui en avait bien l’air, car normalement les monstres venaient toujours en groupe. Mais non, en fait, c’était pire que cela… Bien pire…
C’était Ganondorf.12-Les polymorphes
Oni-Link sentit son cœur arrêter de battre. Il tâta son dos ; il avait oublié d’amener avec lui l’écu d’Assayli. Comme il pouvait être bête ! Uniquement cet objet pour le protéger des terribles attaques du prince de l’obscurité. Maintenant, par sa faute, le sort du monde en paierait le prix.
- C’est le moment, dit Link Noir, qui semblait tout aussi effrayé que lui – c’était bien la première fois que la bonne partie de son être percevait le crainte dans la voix de sa sombre moitié. C’est à ton tour de jouer. Oublie le bouclier, tu pourras toujours aller le récupérer quand tu en auras besoin en créant une diversion. Maintenant, concentre-toi uniquement sur le combat qui t’attend et… l’avenir d’Hyrule. Tu dois protéger tes hommes. Essaie d’éloigner le maître des ténèbres d’ici.
Le seigneur du mal était à présent tout près de lui. Jamais le héros n’eut autant envie de se retourner et de s’enfuir à toute vitesse. Si ça n’avait été que lui, il l’aurait fait. Mais l’enjeu relié à cela et le fait que tout le peuple d’Hyrule voire des contrées au-delà se fiait à lui l’en empêchait. Il conservait l’épée en main, aux aguets. Ganondorf s’arrêta finalement devant lui. Derrière, il sentit ses troupes reculer ; mais lui demeura immobile, fixant le seigneur du mal avec haine. Il peinait à comprendre comment un être aussi mauvais pouvait exister. Il trouvait que son ennemi juré avait un peu changé depuis leur dernière rencontre, étant devenu plus large, mais il ne s’en soucia pas.
La bouche du prince de l’obscurité et laissa échapper un rire démoniaque. Oni-Link tressaillit. Cet homme était vraiment fou.
Le seigneur du mal cessa subitement de rire. Sa bouche s’étira plutôt en un rictus de haine. Il déclara d’une voix grasse :
- Tu sais bien que tu n’as aucune chance contre moi, gamin. Tu as peut-être réussi à vaincre mes troupes, mais tu n’as aucune chance contre moi, tu le sais bien.
- Tu crois ? fit Oni-Link, même si son manque d’assurance était clairement audible dans sa voix, ce qui le fâcha.
- Je ne crois pas, j’en suis convaincu. Or dans ma grande générosité, je te propose de t’allier à moi. Toi aussi, Zelda.
La princesse, qui se trouvait un peu en retrait, sursauta en attendant son nom.
- Même si j’ai déjà récupéré la partie de la Triforce que vous possédiez, comme vous le savez déjà…
Les hommes d’Oni-Link étaient interdits. Comment leur commandant avait pu leur cacher une telle chose ? Ils auraient peut-être pris une autre décision que de combattre s’ils avaient su que la guerre était perdue à l’avance.
- … même si j’ai déjà récupéré la partie de la Triforce que vous possédiez, vous en gardez encore une trace en vous. En vous unissant à vous, nous pourrons dominer le monde ! Voir les mondes ! Car les déesses ne pourront rien faire contre nous, nous seront trop puissants… Alors, qu’en pensez-vous ? Ne vous rendez pas compte de la chance que je vous offre ?
- Tes paroles puent le mensonge, grommela Oni-Link avec mépris.
- Je laisserai même la vie des Gorons, Zoras et compagnie sauve ! À condition que vous acceptez, bien sûr. Allez, suivez-moi…
- Pouah !
Une voix résonna dans la tête du héros.
- Attaque-le pendant qu’il est déconcentré, Link. ATTAQUE-LE !
Oni-Link traversa le corps du maître des ténèbres de sa lame. Ganondorf ouvrit la bouche, mais il ne dit rien.
Puis, son visage se décomposa, et il fut réduit en… une gelée noirâtre et frétillante, avant de disparaître.
- Mais qu’est-ce que…, balbutia le héros.
- Oh non…, marmonna Link Noir. Comment n’ai-je pu pas le remarquer… Évidemment, il me semblait que, la dernière fois que j’avais vu le prince de l’obscurité dans l’Outre Monde, il ne ressemblait pas à cela…
- Qu’est-ce qu’il y a ? le questionna sa bonne moitié.
- C’est un polymorphe.
- Un poli quoi ?
- Un polymorphe. C’est une créature très intelligente qui a la possibilité de se transformer en n’importe quelle personne humanoïde, à condition de l’avoir déjà vu au préalable. La ressemblance est très grande, mais le polymorphe oublie toujours des détails. C’est pourquoi il ne faut surtout pas se fier aux apparences. Les polymorphes retrouvent toujours leur forme originale à leur mort. Ganondorf a voulu nous piéger en nous invitant à pénétrer dans son antre. Une chance que nous ne sommes pas bêtes…
Oni-Link eut un frisson. La ressemblance était vraiment frappante, et il ne se remettait pas encore de son face-à-face avec celui qu’il devrait pourtant tuer dans un avenir rapproché. Il se retourna et informa ses troupes de ce que lui avait appris sa sombre moitié, les soldats étant toujours extrêmement décontenancés, ne sachant s’ils devaient se réjouir ou pas.
- Il se peut qu’il y en ait d’autres. Si vous voyez quelqu’un que vous connaissez mais dont le comportement où l’apparence est étrange, tuez-le immédiatement. Je suis tout aussi troublé que vous.
Il se retourna et eut la surprise d’apercevoir Zelda.
- Mais que fais-tu là ? s’exclama-t-il ? Retourne avec les autres, on peut se faire de nouveau attaquer à tout moment. Mais… un instant…
Il s’accroupit juste à temps pour éviter la lame de la princesse, ou du moins ce qui en avait l’aspect. Il se releva et planta sa propre épée dans le ventre de Zelda, l’empalant, révélant du même coup le polymorphe qui se prenait pour elle. Il se retourna et déclara à ses troupes :
- Voici la preuve que…
- ATTENTION !
Oni-Link ne se retourna pas à temps. Une flèche se ficha dans son épaule. Il grogna et, d’un geste brusque, extirpa le projectile de son corps. Le sang commença à déferler sur son bras. Étant donné qu’il se battait précédemment de ce côté, il changea son arme de main. Il s’occuperait de sa blessure plus tard ; il y avait beaucoup plus urgent.
Il fit volte-face pour faire face à une armée de… membres de l’Union d’Hyrule et d’Ezneclais se ruaient dans leur direction. Il cria :
- Ne prenez surtout pas un de vos confrères pour un ennemi ! De la même manière, ne prenez pas un ennemi pour un confrère !
Ce combat était le plus déroutant auquel ils avaient eux affaire. Il fallait se dépêcher avant que les vrais guerriers ne se mélangent aux faux.
- Tentez de vaincre votre propre avatar ! Ainsi, nous réussirons à en venir à bout plus efficacement !
Oni-Link se vit lui-même, plus grand que les autres, se diriger vers un de ses soldats, qui ne savait s’il devait attaquer. Cela lui coûta la vie. Le héros courut vers sa personnification. Epona était toujours à l’écart du combat ; cela était plus pratique pour un tel combat. Oni-Link se jeta sur l’autre Oni-Link, lui coupant la tête comme on eût coupé celle d’une cocotte. Avant qu’il ne devienne gélatineux, il put avoir un aperçu du visage du polymorphe. Il ne me s’empêcher d’esquisser un sourire, malgré que la situation ne fût pas du tout à la rigolade. Il dit à voix basse :
- Il me semble que je n’ai pas d’aussi grandes oreilles…
Il reporta son attention sur les autres. Cette fois-ci, il ne pouvait leur être d’aucun aide : il ne saurait différencier ses alliés à ses opposants. Le combat devenait chaotique étant donné que tout le monde cherchait sa propre incarnation et se bousculait pour l’occire.
Zelda vit Naec se diriger vers elle. Le sous-commandant lui dit :
- Vite ! Nous devrions nous éloigner afin de ne pas croiser notre propre avatar.
À ce moment, une deuxième personne, identique, fit son apparition.
- Non, ma chérie, tu ne dois pas le croire ! C’est moi, ton amant ! Le vrai Naec !
- Ne te laisse pas berner par lui. Allez, tuons-le !
Zelda regardait tour à tour les deux copies quasiment identiques de son bien-aimé. Elle ne parvenait pas à différencier le vrai du faux, ce qui l’horripilait.
C’est alors que l’un des deux dit quelque chose qui mit les choses au clair :
- Zelda, crois-moi… Un polymorphe ne saurait pas, par exemple, que tu m’as embrassé pendant un tour de garde.
La princesse aurait ri si le contexte avait été différent, mais elle se contenta de poignarder celui qu’elle croyait être le faux Naec, des larmes emplissant ses yeux de peur d’assassiner son propre amant malgré elle. À son grand soulagement, l’homme qu’elle tua devint de la gelée. Elle poussa un long soupir et enlaça le soldat.
C’est ainsi qu’eut lieu ce qui fut probablement la plus insolite des batailles : chaque guerrier se battait contre lui-même.
Après de longues minutes de combat acharné, on vint finalement à bout de tous les polymorphes, même si les gens continuaient à se regarder avec suspicion. L’obscurité tombant et devant l’absence d’apparition de nouveaux monstres venant de la citadelle, on revint au campement. On pansa l’épaule du héros ; la blessure était étonnamment – mais heureusement – superficielle. La nuit passa rapidement et fut sans encombre.
Le lendemain matin, Oni-Link se réveilla un peu avant l’aube, en même temps que Fehan et Naec. Il en profita pour discuter avec eux.
- Nous n’allons jamais réussir à vaincre les troupes adverses avec le peu d’effectifs qui nous restent, dit Fehan. Jamais. Je propose qu’on parte loin, très loin, tellement loin que le maître des ténèbres ne pourra pas nous atteindre avec des lustres. On pourrait même vous héberger à Eznecla un moment, ce qui ne vous serait sûrement pas refusé.
- Ne soit pas pessimiste, dit le héros, même si lui-même doutait grandement de la chance de réussite de l’Union.
L’autre continua sur sa lancée :
- Il nous aurait fallu de la machinerie. Cela vous aurait grandement aidé. Mais bon, peut-être n’êtes-vous pas assez avancé technologiquement et cela aurait été long à construire, et ardu à transporter. Nous, à Eznecla, on décime les centaures par centaines avec nos trébuchets.
- C’aurait été un peu ironique que nous détruisions notre propre ville, fit remarquer Naec. Mais bon, il faut admettre que ce n’est plus vraiment une ville, et puis Ganondorf doit déjà l’avoir tellement ruinée… je n’ose même pas m’imaginer à quoi ressemble le Grand Marché maintenant… et j’espère que des moblins ne sont pas venus habiter chez moi… beurk…
Ils rirent à cette blague, puis un silence s’installa entre eux ; Fehan le coupa en déclarant :
- Bon, il serait temps que je réveille mes braves guerriers. Puissions-nous nous revoir ce soir.
C’était sa façon de leur dire « heureux de vous avoir connu ».
Oni-Link, lui se dirigea vers l’un des soldats qui surveillaient la Plaine d’Hyrule lors du précédent tour de garde, lui demanda s’il avait noté quelque chose de suspect durant la nuit.
- Rien de spécial, répondit le jeune Ezneclais à l’accent prononcé. Je n’ai vu que Sebooru et Fehan qui revenaient d’une marche nocturne – je ne crois pas que c’était une bonne idée de sortir sur la Plaine la nuit, mais bon –, mais sinon rien de menaçant.
Rassuré, le commandant revint au campement.
Non loin de là, Fehan vérifiait si tous ses hommes s’étaient levés, sans quoi il les réveillait lui-même de sa manière brutale mais efficace. Une fois que tous les Ezneclais furent sortis à l’extérieur et qu’il s’apprêtait à sortir lui aussi, il vit Sebooru venir en sens inverse. Il voulut faire volte-face, mais il était évident qu’elle l’avait aperçu.
- Je t’avais dit que je ne voulais plus que nous nous côtoyons, dit-il avec tristesse.
- Je sais mais… je veux te montrer quelque chose, répondit la Gerudo. Vient, suis-moi, ce ne sera pas long.
L’Eznaclais, devant sa mine obstinée, ne put refusée. Il lui emboîta le pas dans le dédale de la Forteresse, jusqu’à attendre une piège très éloignée, où il n’y avait qu’une cellule de cachot vide et des pots brisés. Sebooru s’arrêta et le plaqua contre le mur pour poser ses lèvres sur les siennes. Encore une fois, Fehan ne put résister… Lorsqu’elle cessa son baiser, il insista :
- Sebooru, attends la fin de la gu…
Il fut interrompu par la Gerudo qui l’embrassa de nouveau.
Cependant, tout à coup une cloche sonna dans sa tête. Il poussa de toutes ses forces la femme rousse, dont la tête heurta violemment le mur de pierre, ce qui la fit tomber au sol. Il sortit son épée de son fourreau et l’enfonça dans le corps de Sebooru. Celle-ci cessa de bouger. Fehan attendit quelques secondes, sentant l’inquiétude croître en lui en voyant que la dépouille ne se transformait pas en gelée. Une larme coula le long de sa joue.
- Oh non… ce n’était pas un polymorphe…
Il tomba à genoux, fondant en pleurs. Puis il regarda de nouveau Sebooru.
Elle avait disparu.
12-Nouvelles, décisions et marionnettes
- Reold ?
- Présent !
- Erracka ?
- Présente !
Tous les membres de l’Union d’Hyrule formaient un rang bien droit. Oni-Link circulait devant eux, examinant chaque visage, guettant chaque geste de ses hommes. Il arriva finalement au dernier nom de sa liste, et ne put s’empêcher de sourire en lisant :
- Link ? Présent !
Les soldats rirent également à cette parole. Le héros tentait de mettre un peu de joie dans le campement ; c’était l’une des rares choses qui étaient encore en son pouvoir.
- Bon, il n’y a pas d’autres polymorphes parmi nous, dit-il. S’il y en avait eu un, on aurait trouvé le corps de la personne en laquelle il se serait transformé sur le champ de bataille, et cet individu n’aurait pas apparu sur ma liste.
Oni-Link avait décidé de vérifier s’il ne restait plus aucun double à la suite de la mésaventure, qui avait encore de la difficulté à s’en remettre. Il s’était jeté dans les bras de Sebooru en l’apercevant, la Gerudo en étant décontenancée mais également heureuse de retrouve la proximité de l’homme dont elle s’était éprise. Par la suite, ils avaient décidé de se séparer de nouveau, comme c’était le cas au préalable.
Un sanglier pénétra alors dans le campement. Un guerrier s’apprêta à l’empaler de sa lance…
- Miam, enfin de la nourriture, nous commençons à en manquer…
- NON ! s’exclama Oni-Link, qui vit dévier l’arme d’hast de sa cible d’un habile jet de vent.
Le sanglier s’éloigna à toute vitesse de l’homme qui avait voulu le tuer. Ce dernier s’exclama, offusqué :
- Mais que fais-tu ? On aurait pu nourrir plusieurs hommes avec cet animal !
- Je n’ai pas à m’expliquer, dit simplement le héros, qui ne voulait pas révéler la véritable nature de Kuy aux autres. Maintenant, regagnez vos abris et préparez-vous au combat. Et ne vous attaquez plus à aucune bête semblable.
- Mon frère Oblix aurait bien aimé le manger, ce sanglier... s'il était toujours en vie, marmonna un Goron, la mine triste, avant de se diriger silencieusement vers sa tente.
Oni-Link se hâta vers l’endroit où s’était dirigé l’Onoadien. Cela faisait longtemps qu’il ne l’avait pas vu. Quand il rejoignit l’homme-animal, celui-ci avait déjà retrouvé sa forme humaine. Il informa son commandant :
- J’ai reçu à pénétrer dans la tour de Ganondorf.
- Et puis ? le pressa le héros.
Kuy parut hésiter. Il lâcha d’un ton découragé :
- À ce que j’ai pu voir, il lui reste encore plus de la moitié de ses effectifs.
Oni-Link baissa la tête. Le destin funèbre qui les attendait se concrétisait de plus en plus. Mais, quoi qu’il arrivât, ils devaient se battre jusqu’à ce que tous ses guerriers aient passé l’arme à gauche.
- As-tu vu des bêtes ressemblant à de la gelée ? demanda le héros.
- Non… euh oui… mais elles ont toutes disparues récemment.
- Enfin une bonne nouvelle… C’est tout ?
- À peu près, oui.
- Merci beaucoup de ton aide, Kuy. De telles informations peuvent nous être essentielles et pourraient même changer l’issue de la guerre.
- Je vais de ce pas continuer à rechercher de l’information.
Kuy s’éloigna, retrouvant sa forme animale.
Oni-Link retourna sur ses pas et regagna sa tente. Il s’assit à même le sol, plaquant ses mains contre ses tempes. Ils allaient perdre la Guerre de la Triforce, c’était certain. Il fallait faire quelque chose. Il le fallait. Il ne pouvait sacrifier d’autres vies sans réagir.
- Je crois que j’ai une idée, dit Link Noir. Si Kuy a réussi à entrer dans l’antre du maître des ténèbres, c’est que celui-ci a enlevé sa protection. Il a probablement fait exprès. Il veut que tu l’y rejoignes Link. Il faut bien que ce combat final que tu attends depuis si longtemps ait lieu. Mais avant, il faudrait que tu fasses une diversion, afin de diriger son attention ailleurs et ainsi le prendre par surprise. Néanmoins, je n’ai aucune idée de diversion.
- Il faut que je parle avec Naec et Fehan, déclara le héros.
Il sortit à l’extérieur, rabattant la toile de sa tente derrière lui, et héla ses subalternes immédiats, les invitant à entrer dans son abri personnel. Les deux hommes le suivirent sans tarder. Oni-Link leur fit par des propos de sa sombre moitié. Fehan hocha la tête.
- C’est vrai que nous aurions dû penser à cela depuis longtemps. Nous savions déjà que n’étions pas assez d’homme. Le roi d’Eznecla est généreux, mais il doit aussi défendre son propre royaume, donc je ne crois pas qu’il ne vous en aurait donné davantage. La question est : que faire ?
Naec paraissait pensif. C’est alors qu’il s’exclama :
- Capitaine, je viens d’avoir une idée géniale ! Ce sont les polymorphes qui m’ont inspiré.
- Je t’écoute.
- Cela peut sembler un peu ridicule mais… nous pourrions fabriquer une marionnette, un mannequin similaire à toi, quoi. Le maître des ténèbres croira que tu es encore sur le champ de bataille. Un des hommes peut même se cacher derrière ta représentation pour la faire bouger, ce qui rendrait l’imitation encore plus réaliste. Mais confectionner un tel objet prendrait un certain temps… Je n’aime pas faire cela, mais on pourrait demander aux blessés. J’en connais un qui un est habile artisan et qui a perdu une jambe au combat. Étant donné qu’il n’est pas dans la mesure de ce battre, cela l’occuperait en plus de nous être utile. Par contre, tu ne vas quand même pas pénétrer seul dans l’antre de Ganondorf ?
- C’est ce que je comptais faire, oui.
- Ce n’est pas une bonne idée. Je t’accompagne. Fehan restera pour s'occuper des troupes. Nous devrons aussi faire une marionnette pour moi.
- Non, je refuse. Je ne veux pas être la cause de d’autres morts…
- Même si tu n’acceptes pas, je viendrai…
Oni-Link soupira. Il connaissait l’entêtement de cet homme et savait déjà qu’il ne pourrait pas lui faire entendre la raison. Il accepta donc, malgré que son instinct lui indiquât qu’il n’aurait pas dû le faire…